Le Conseil français du culte musulman réaffirme son opposition au mariage pour tous
Le bureau exécutif du conseil français du culte musulman (CFCM), réuni mardi 6 novembre 2012, a adopté un texte de son président, Mohammed Moussaoui, intitulé À propos du projet de loi « Mariage pour tous » .
Le texte, long de cinq pages, rappelle en préambule que « le mariage fait l’objet d’un encadrement particulier dans la jurisprudence musulmane, comme en témoignent les nombreux textes coraniques et traditions prophétiques qui traitent des questions du statut personnel et de la famille ». « Il ressort de ces textes que le mariage, selon la religion musulmane, est un pacte fondé sur le consentement mutuel en vue d’établir une union légale et durable (Coran 4.21), entre un homme et une femme ». De ce fait, « la non-conformité du “mariage homosexuel” avec les principes de la jurisprudence musulmane fait l’unanimité au sein de toutes les écoles juridiques musulmanes », écrit Mohammed Moussaoui.
C’est surtout en raison des changements qu’il induirait en matière de filiation et sur « le sens » de cette institution que le président du CFCM critique le projet de loi. « Ce pacte entre un homme et une femme crée une relation de filiation réelle et structurante non seulement de la relation de l’individu avec ses ascendants et ses descendants, mais également de sa relation avec les autres membres de la société », note-t-il en effet.
« Le projet de loi portant sur l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe n’est pas une simple extension d’un statut réservé aujourd’hui à des couples hétérosexuels, il s’agit de transformer profondément une institution millénaire qui a permis à l’humanité de continuer à exister et à s’organiser avec des repères clairs, en harmonie avec la création tout entière : “Nous avons créé de toute chose deux éléments de couple (mâle-femelle), peut-être vous rappelez-vous” (Coran 51.49) ».
Principe de laïcité
Le CFCM prend bien soin de rappeler que « compte tenu du principe de laïcité qui tient compte de la diversité et de la pluralité des religions et des convictions au sein de notre société », il est conscient « que les règles et les normes d’une religion ne peuvent être mises en avant pour s’opposer ou se soustraire aux normes et aux règles de la République qui s’appliquent à tous ». Il réaffirme également sa condamnation « ferme » de « tout acte homophobe ». Il entend toutefois « contribuer, dans cet esprit, aux débats démocratiques et à l’évaluation des choix projetés pour notre modèle sociétal ».
Constatant que le gouvernement comme les associations de personnes homosexuelles s’appuient sur le principe d’égalité, le président du CFCM, Mohammed Moussaoui, réfute, lui, cet argument. « Le principe de l’accès sans discrimination à une institution ne peut être dissocié de la mission assignée à cette institution. C’est les conditions de l’accomplissement de cette mission qui déterminent les qualités requises pour les candidats qui souhaitent y accéder », rappelle-t-il, en soulignant que la mission du mariage « est aussi la fondation d’une famille stable sous la direction des deux époux ».
« Le fait que deux personnes de même sexe puissent déployer tous les moyens pour donner à un enfant de l’amour et de l’affection, ne peut être un argument pour relativiser une donnée anthropologique et psychologique fondamentale qu’est le besoin d’un enfant d’avoir une filiation réelle issue d’une mère et d’un père », note le texte.
D’autres problèmes éthiques
Enfin, « d’autres problèmes éthiques à ne pas sous-estimer peuvent resurgir via la question du mariage », poursuit-il, en citant la « présomption de paternité », qui existe aujourd’hui au sein des couples mariés, l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA), ou encore le débat sur la gestation pour autrui.
« Au nom du principe d’égalité et d’équité, pourquoi imposer aux couples hétérosexuels et à leurs enfants la suppression des mentions (père et mère) dans leur état civil lorsqu’on sait que cette suppression aurait forcément un impact sur leurs sentiments, leur identité et leur vie quotidienne ? », s’interroge également Mohammed Moussaoui.
Enfin, considérant le nombre « très réduit » de couples homosexuels concernés par ce projet de loi, il s’interroge sur l’opportunité d’introduire « une évolution importante dans la vie en société avec le risque d’ouvrir un débat passionnel qui divise au moment où il y a nécessité de concentrer les efforts de tous sur les priorités et les défis importants qui se présentent à notre pays ».
Auditionné à la mi-octobre par le groupe UMP à l’Assemblée nationale, Mohammed Moussaoui avait constaté que « le projet était présenté comme un moyen de lutter contre une discrimination ». Il s’était toutefois demandé s’il n’y avait pas, au nom de l’égalité revendiquée pour tous, « une confusion entre l’égalité et la similitude. Deux personnes peuvent être égales mais non semblables, ou être semblables mais non égales ».