Retour sur les Ecclésiales 2013
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Mot d’introduction du vernissage
Chers amis,
Soyez tous les bienvenus à notre exposition éphémère. Je salue fraternellement M. le Pasteur Daniel Ruch et son épouse. Leur présence nous montrent que nos liens fraternels œcuméniques sont vivants et opportuns dans le cadre de cette exposition qui s‘ouvre aussi sur l’Ecriture.
Au cours de son histoire, l’Eglise Catholique a toujours eu le souci d’entrer en dialogue avec l’art et les artistes, dialogue parfois tendu mais dialogue voulu. Cet échange a été fécond comme en témoigne toute la production artistique dans nos églises et nos musées, dans nos villes et nos campagnes, et qui constitue notre patrimoine commun. Notre culture française et européenne si riche s’enracine dans ce dialogue entre art et foi, même si elle ne s’y enferme pas et s’ouvre à d’autres.
En ces temps de crises où la tentation pour tous est de se refermer idéologiquement dans ses bastions, le pape François nous invite, nous catholiques, à une culture de la rencontre, à privilégier la relation. C’est l’expérience que nous souhaitons vivre au cours de cette journée.
Aussi avec l’équipe d’animation pastorale de la communauté de paroisses, il nous a paru intéressant qu’au cours de ces Ecclésiales, nous nous plongions dans cette expérience d’ouverture, en s’offrant un dialogue libre et respectueux entre l’art contemporain et l’Ecriture.
Je remercie déjà nos artistes que je connais bien, Raphaëlle Halter et Aude Deffense, pour avoir osé ce dialogue. Dans quelques instants, vous aurez l’occasion de les entendre se présenter, et présenter aussi leurs œuvres. Chère Raphaëlle, chère Aude, soyez remerciés de tout cœur de votre générosité.
Ce matin, la communauté chrétienne a déjà célébrée sa foi au milieu des œuvres exposées. Nous avons vécu une première rencontre entre le rite catholique, la prière et l’art d’aujourd’hui.
Cet après-midi nous poursuivons notre expérience de dialogue. Dans ma réflexion personnelle, il me semble que la démarche artistique contemporaine procède finalement du même mouvement que la démarche de foi et l’expérience spirituelle: elle met au cœur l’abandon, l’abandon créatif, l’abandon confiant et libre.
Et elle invite à se laisser volontairement déplacer, à se laisser traverser et enrichir en faisant un pont entre ses sens et son intériorité.
A cause de la culture de l’image dans laquelle nous sommes plongés en permanence et qui nous conditionne, nous traverserons sûrement la surprise, l’étonnement, peut-être une part d’incompréhension. Mais -je le souhaite aussi- la joie de découvrir une réalité au-delà de soi, qui ouvre le coeur et l’esprit à plus grand que soi.
C’est le beau pari et la belle perspective de fécondité de tout dialogue entre art et foi.
Que cette exposition nous ouvre un chemin de sens, et nous donne cette liberté propre aux artistes et aux croyants de nous offrir un temps tout simple et gratuit de rencontres et d’amitiés.
Vous trouverez aux portes de l’église un petit guide souvenir de cette exposition, à emporter chez soi comme un prolongement de cette rencontre.
Je laisse maintenant la parole à Raphaëlle et à Aude, pour nous donner quelques explications.
Le mot d'introduction de Raphaëlle HALTER
Bonjour,
Le Père Dominique Thiry a très justement parlé de ma démarche en termes d'abandon.
Pour peindre de cette manière, je dois abandonner tout ce que je sais, tout ce qui me préoccupe, tout ce que j'imagine, tout ce à quoi je pense. J'essaye de me mettre dans un état d'abandon et de réception le plus grand possible.
Je trace de grands traits de pinceaux qui sont comme des cheveux noirs et fins qui par pudeur recouvrent le blanc aveuglant du support.
Et à travers ces traits de pinceaux, je fais emerger une forme bleue.
Si j'arrive à m'effacer suffisemment, la forme se déforme, se transforme, se dessine elle-même comme ce que l'on peut observer dans la Nature.
Et alors, elle devient une présence vivante. Je la ressens comme si mon coeur était directement relié à mon oeil, sans la comprendre.
Lorsque je lis le poème de Aude et le verset biblique qui accompagnent le tableau, j'entends qu'ils sont traversés par la même intimité. Et c'est toujours une grande surprise de constater que nous sommes ainsi reliés.
Alors je vous demanderai de ne pas réfléchir, de vous placer simplement devant chaque chevalet comme devant une fleur que l'on va respirer, de vous abandonner ...
L'abandon…s'abandonner…
Le mot d'introduction d'Aude DEFFENSE
S'abandonner en confiance dans l'amitié, avec Raphaëlle et le Père Dominique.
S'abandonner au don de chacune, la peinture, l'écriture.
C'est une rencontre entre le tableau et les mots, la quête d'un équilibre merveilleux, d'une harmonie, dont la condition est de ne pas tricher; une transparence de l'une envers l'autre dans l'art, comme une "mise à nue" devant l'invisible.
Mais peut-on tricher devant l'invisible?
La peinture, l'écriture, sont ces langages de l'invisible qui ne peuvent se manifester que lorsque l'on s'abandonne, lorsque l'on accepte de se faire "passeur".
S'abandonner à l'art, mais surtout à soi-même, pour nous comme pour vous. Se faire confiance dans ce que l'on ressent.
Dieu ne se comprend pas toujours mais s'offre et se reçoit.
Alors, si votre raison ne comprend pas, laissez s'ouvrir "l'oreille de votre coeur"!
Le crayon et le pinceau sont des clefs, l'art une porte; Poussez-la, abandonnez-vous!
L'homélie lors de la célébration du matin, de Dominique THIRY+
Chers amis,
Chaque premier dimanche d’octobre, la fête des Ecclésiales nous donne l’occasion de nous rassembler en communauté de paroisses. C’est un moment de partage. Mais c’est plus profond encore : c’est avant tout une joie spirituelle.
La figure du Christ qui est imprimée dans nos cœurs depuis le jour de notre baptême comme une œuvre d’art faite de notre chair et de la chair de Dieu se reflète dans cette communion que nous vivons aujourd’hui. Et chaque fois que nous tissons des liens entre nous, mais aussi avec d’autres, nous réalisons notre devise. « Christ au cœur pour tous ».
Ces Ecclésiales sont l’occasion de réfléchir à notre situation, de nous ouvrir sur le monde, de faire un bout de chemin avec cette humanité de bonne volonté qui touche tant le cœur de Dieu.
Et pour cela, l'essentiel, comme le rappelle le pape François, c'est de remettre le Christ au centre. C’est de nous dépouiller de tout le superflu dans nos têtes, de nous décentrer de nous-mêmes, d’aller aux périphéries, pour rencontrer Jésus.
Oui, la foi m’ouvre à condition de laisser Jésus me déplacer. Mais pourquoi je n’y arrive pas? Je crois que ce qui me bloque, ce sont essentiellement mes peurs et mes angoisses, et notamment celle de perdre ma liberté.
Qu’est-ce qui peut les faire tomber ? La rencontre réelle et personnelle avec Jésus.
Tant que je n’ai pas fait cette rencontre, je reste dans la peur, ou je me carapace derrière des valeurs morales, qui ne sont finalement qu’un vêtement rapiécé sur ma nudité et ma solitude spirituelle.
Chaque fois que j’accepte l’invitation de la rencontre, je croise le visage de Jésus, et je demeure auprès de Lui, tout en le recherchant encore, car ma recherche n’est jamais achevée. Je ne peux jamais dire « j’ai saisi le Christ ». Tout au plus je peux dire que j’ai été saisi par Lui. Dans la foi, tout est là : une présence de Dieu certaine, mais que je touche dans l’obscurité, ou plutôt qui me touche dans l’obscurité de ma vie.
Aussi, comme les apôtres dans l’Evangile, je suis là devant Jésus à le supplier : « augmente en moi la foi », et aide moi à témoigner de ta présence dans ce monde.
Mais comment faire ? Oui, j’ai conscience que l'essentiel de notre vie de communauté de paroisses, notre mission principale, notre raison d’être, c'est de permettre à nos contemporains de découvrir le Christ en toute liberté. Et de le découvrir sans être gênés ou empêchés par une culture qui est datée, ou tout simplement qui n’est pas la sienne.
Mais aujourd’hui plus que jamais, la difficulté c'est de faire cohabiter les générations entre elles dans une société plurielle, qui disperse et divise aussi.
Alors comment pouvons-nous faire ? Là encore il faut se plonger dans la Parole de Dieu qui est notre seul guide. Comme le prophète Habacuc qui se plaint de la situation détestable de la société de son époque, je suis souvent à poser la question au Seigneur : « combien de temps, Seigneur, vais-je t’appeler au secours et tu n'entends pas! Pourquoi m'obliges-tu à voir l'abomination et restes-tu là, à regarder notre misère ? »
Et la réponse de Dieu depuis Habacuc jusqu'à nos jours est la même : « tu vas mettre par écrit la vision, bien clairement sur des tablettes pour qu'on puisse la lire couramment. Cette vision se réalisera, mais seulement au temps fixé. Elle tend vers son accomplissement, elle ne décevra pas. »
Vous avez entendu la réponse de Dieu !
Qu’avons-nous fait ? Eh bien nous avons mis par écrit la vision. Cette vision, c'est notre projet pastoral local, qui vous a été distribué l’an dernier.
Avec l’Equipe d’Animation Pastorale, nous avons mis par écrit cette vision pour qu'elle soit communiquée largement au plus grand nombre. Nous l’avons distribué dans toutes les boîtes aux lettres. Nos tablettes ne sont plus de pierre, mais de papier. Et elles tendent à devenir électroniques parce le monde bouge et change. Ce projet, nous le retrouvons aussi sur notre blog.
Et comme le montre le premier catho info que toute la population a reçu, nous mettons ce projet en œuvre, concrètement, modestement, en toute simplicité, sachant que c’est le Seigneur qui donne la fécondité. Nous avons voulu nous mettre à l’écoute du Seigneur. Et aujourd’hui nous lui redisons que nous croyons en Lui, en sa Parole, en sa présence qui nous assiste, en son efficacité.
Notre projet porte sur les quatre années à venir. Dans ce projet, il y a un ensemble de propositions nouvelles dirigées vers toutes les générations: les enfants et les jeunes, les jeunes adultes, les adultes, les blessés de la vie, les personnes âgées, les retraités.
Ne vous étonnez pas de voir cohabiter la Top louange sur fond de musique Pop Rock, avec l’adoration du St Sacrement, la crèche vivante new look -qui rappellera à certains leur enfance- avec la communion et la visite des malades.
Chaque génération est invitée à vivre la communauté selon sa culture propre, sans avoir à se renier, avec ce désir de vivre la rencontre de Jésus.
Personne n’est exclu. Je le répète, personne n’est exclu. « Christ au cœur pour tous », telle est la devise qui nous est cher.
Chers amis, ce projet n’est pas clos. Il est au contraire très ouvert. Et il sera enrichi par nos engagements personnels, par nos idées et nos différentes cultures.
C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à mes amies, Raphaëlle Halter et Aude Deffense, de bien vouloir nous ouvrir à l’art contemporain.
Cet art peut paraitre obscur de prime abord. Mais il me semble que cet art est une invitation à nous décentrer de nous-mêmes, à nous déplacer, à nous faire découvrir la richesse de nos sens, de notre intériorité, et ce en toute liberté. Au final, grâce à cette rencontre, nous pouvons nous retrouver humainement plus riche.
Dans cet art, j’y vois personnellement la même démarche, la même écoute intuitive de cette Parole de Dieu qui n’a pas de frontière, qui est créative, qui appelle sans cesse au dépassement de soi, et qui est toujours réponse à une incompréhension, à une interrogation de la vie. « Tu vas mettre par écrit la vision, bien clairement sur des tablettes pour qu'on puisse la lire couramment. » L’acte créateur est là, dans cette Parole qui redonne vie.
Nous verrons cet après midi comment cette Parole a pris discrètement chair dans le cœur de nos artistes, à travers la peinture, -la vision-, et l’écriture, -l’écrit-.. Rendez vous ici même à 16h00 pour le vernissage, une introduction à cet art et un échange, une rencontre.
Mais avouez-le : comme c’est étonnant d’entendre cette Parole de Dieu au cœur de notre journée. Je n’avais pas pris connaissance des lectures de ce jour avant d’inviter nos artistes. Ces lectures sont celles qui nous sont données par l’Eglise en ce 27ème dimanche du Temps Ordinaire. Et elles sont entendues dans les églises du monde entier. Comme c’est étonnant !
N’est-ce pas la preuve que Dieu tisse les liens mystérieux de nos rencontres, et que c’est Lui qui nous assiste et nous soutient au cours de notre existence, et parfois dans les moindres détails. Amen