Assise 2011: croyants et non croyants ensemble pour la paix
ROME, jeudi 27 octobre 2011 (ZENIT.org) – Croyants et non-croyants sont devenus des
"compagnons de voyage" à Assise, vers la paix, a fait observer le cardinal Turkson.
C’est en effet le cardinal africain Peter Kodwo Appiah Turkson, président du Conseil pontifical justice et paix qui a ouvert la rencontre d’Assise : c’était son prédécesseur le cardinal Roger
Etchegaray qui avait été chargé par Jean-Paul II d’organiser la première rencontre d’Assise de 1986. Le dicastère en a gardé l’organisation.
Le premier rassemblement de la journée a eu lieu en la basilique Saint-Marie-des-Anges, au pied de la colline d’Assise, une basilique qui sert d’écrin à la petite chapelle de la Portioncule et
dans laquelle saint François est mort.
Tandis que les représentants de différentes confessions chrétiennes, de différentes religions et d’autres orientations philosophiques arrivaient, le chœur franciscain chantait en italien des
textes de leur fondateur : « Louez et bénissez mon Seigneur. Servez-le en grande humilité ».
« Nous sommes ici parce que nous avons conscience d’être appelés à vivre ensemble dans la paix », a déclaré le cardinal Turkson.
« La recherche incessante de ce désir de paix fait de nous des compagnons de voyage », a-t-il ajouté en faisant allusion au thème du pèlerinage.
« Nous sommes venus ici, a continué le cardinal originaire du Ghana, pour témoigner de la grande force de la religion pour le bien, pour la construction de la paix, pour la réconciliation de ceux
qui vivent un conflit, pour remettre l’homme en harmonie avec la création ».
Il a évoqué ces 25 ans passés depuis la rencontre du 27 octobre 1986, qui manifestait chez les participants leur « sens de la fraternité », de la « solidarité », « au service du monde et de la
famille humaine ».
Il a cependant souligné qu’un tel rassemblement doit déboucher sur une vraie « communauté de vie », dans laquelle il faut entrer « en profondeur, humblement, avec le désir d’avancer », grâce
notamment aux « moyens de communication » qui permettent une « connaissance » et une « proximité » possible comme jamais auparavant.
Devant le défi de la violence et des divisions, le cardinal Turkson a indiqué le défi de « regarder l’autre avec respect », avec « amour » et « indépendamment de sa croyance ».
Il a souligné « l’urgence » d’un changement quotidien, « par la raison », « par la foi », en devenant « toujours plus pèlerins de la vérité », sur « ce long chemin de paix » : « Bienvenue à
nouveau à Assise ! » a conclu le cardinal Turkson.
Les quelque 300 dignitaires des différentes religions du monde, le pape et ses autres invités ont ensuite assisté à la projection d’un film sur la première rencontre d’Assise, de 1986 – à
l’occasion de l’Année internationale de la paix - , celle de 2002 – après les attentats de 2001 -, mais aussi les paroles de Jean-Paul II aux jeunes à Tor Vergata, en août 2000 pour leur Grand
jubilé.
On a aussi entendu l’appel de Jean-Paul II, en 2003. Le pape polonais faisait remarquer qu’il appartenait à « cette génération qui a vécu, survécu, grâce à Dieu, la 2e guerre mondiale » avant de
proclamer ces paroles de Paul VI à l’ONU : « Jamais plus la guerre ! ».
Anita S. Bourdin
ROME, jeudi 27 octobre 2011 (ZENIT.org) – Croyants et non-croyants doivent « s’engager
résolument pour la dignité de l’homme » et à « servir ensemble la cause de la paix », déclare Benoît XVI.
La vraie nature de la religion n'est pas de susciter la violence, explique aussi Benoît XVI, dans un important discours prononcé ce jeudi matin à Assise, en la basilique Sainte-Marie-des-Anges.
Le pape y réfléchit au rôle des religions dans l'histoire, et l'histoire contemporaine. Il indique une tâche pour le dialogue interreligieux, 25 ans après la première rencontre promue par
Jean-Paul II: il met les croyants et les incroyants ensemble devant leurs responsabilités. Il souligne que le dialogue avec les non-croyants constitue pour les croyants une occasion de « purifier
» la religion (cf. « Documents », pour le texte intégral en français).
Le pape explique ainsi la nouveauté d’Assise 2011, la présence de non-croyants à cette "Journée de réflexion, de dialogue et de prière pour la paix et la justice dans le monde" : « J’ai invité
spécialement des représentants de ce (…) groupe à notre rencontre à Assise, qui ne réunit pas seulement des représentants d’institutions religieuses. Il s’agit plutôt de se retrouver ensemble
dans cet être en marche vers la vérité, de s’engager résolument pour la dignité de l’homme et de servir ensemble la cause de la paix contre toute sorte de violence destructrice du droit. »
A propos de la rencontre du 27 octobre 1986, le pape souligne sa signification : « Les représentants des religions participants en 1986 à Assise entendaient dire – et nous le répétons avec force
et grande fermeté : ce n’est pas la vraie nature de la religion. »
Une contre-religion
Le pape dénonce les idoles modernes et anciennes : « L’adoration de l’argent, de l’avoir et du pouvoir, se révèle être une contre-religion, dans laquelle l’homme ne compte plus, mais seulement
l’intérêt personnel. Le désir de bonheur dégénère, par exemple, dans une avidité effrénée et inhumaine qui se manifeste dans la domination de la drogue sous ses diverses formes. Il y a les
grands, qui avec elle font leurs affaires, et ensuite tous ceux qui sont séduits et abîmés par elle aussi bien dans leur corps que dans leur esprit. La violence devient une chose normale et
menace de détruire dans certaines parties du monde notre jeunesse. Puisque la violence devient une chose normale, la paix est détruite et dans ce manque de paix l’homme se détruit lui-même. »
C’est alors que Benoît XVI affirme la nécessité de purifier la religion : « L’absence de Dieu conduit à la déchéance de l’homme et de l’humanisme, affirme le pape (…). J’ai dit qu’il existe une
conception et un usage de la religion par lesquels elle devient source de violence, alors que l’orientation de l’homme vers Dieu, vécue avec droiture, est une force de paix. Dans ce contexte,
j’ai renvoyé à la nécessité du dialogue, et j’ai parlé de la purification, toujours nécessaire, de la religion vécue. D’autre part, j’ai affirmé que la négation de Dieu corrompt l’homme, le prive
de mesures et le conduit à la violence. »
La fausse certitude de l’athéisme militant
Et le pape souligne qu’il y a une autre façon de vivre, ni religieuse, ni antireligieuse, mais « agnostique » qui peut contribuer à cette purification: « Des personnes auxquelles n’a pas été
offert le don de pouvoir croire et qui, toutefois, cherchent la vérité, sont à la recherche de Dieu. Des personnes de ce genre n’affirment pas simplement : « Il n’existe aucun Dieu ». Elles
souffrent à cause de son absence et, cherchant ce qui est vrai et bon, elles sont intérieurement en marche vers Lui. Elles sont « des pèlerins de la vérité, des pèlerins de la paix ». Elles
posent des questions aussi bien à l’une qu’à l’autre partie. »
Voilà leur contribution face à l’athéisme militant : « Elles ôtent aux athées militants leur fausse certitude, par laquelle ils prétendent savoir qu’il n’existe pas de Dieu, et elles les invitent
à devenir, plutôt que polémiques, des personnes en recherche, qui ne perdent pas l’espérance que la vérité existe et que nous pouvons et devons vivre en fonction d’elle. »
Et voilà leur contribution auprès des croyants : « Mais elles mettent aussi en cause les adeptes des religions, pour qu’ils ne considèrent pas Dieu comme une propriété qui leur appartient, si
bien qu’ils se sentent autorisés à la violence envers les autres. »
Purifier sa propre foi
« Ces personnes, a insisté le pape dans la ligne des rencontres pour « le Parvis des Gentils », cherchent la vérité, elles cherchent le vrai Dieu, dont l’image dans les religions, à cause de la
façon dont elles sont souvent pratiquées, est fréquemment cachée. Qu’elles ne réussissent pas à trouver Dieu dépend aussi des croyants avec leur image réduite ou même déformée de Dieu. Ainsi,
leur lutte intérieure et leur interrogation sont aussi un appel pour les croyants à purifier leur propre foi, afin que Dieu – le vrai Dieu – devienne accessible. »
Il faut certainement inscrire dans la ligne de cette « purification de la foi » le « mea culpa » que le pape a prononcé. Il rappelle ce « mea culpa » du Grand jubilé, lorsque, en union avec
Jean-Paul II, le 13 mars 2000, dans la basilique Saint-Pierre, des cardinaux ont demandé pardon pour les fautes commises par des membres de l’Eglise au cours des siècles. Le cardinal Joseph
Ratzinger a lu la demande de pardon pour toutes les fois où un membre de l’Eglise avait défendu la vérité par la violence.
Benoît XVI déclare : "Oui, dans l’histoire on a aussi eu recours à la violence au nom de la foi chrétienne. Nous le reconnaissons, pleins de honte. Mais il est absolument clair que ceci a été une
utilisation abusive de la foi chrétienne, en évidente opposition avec sa vraie nature. "
L’absence de Dieu nuit à l’homme
Le pape affirme en même temps - en direction des sociétés sécularisées - que "l’absence de Dieu conduit à la déchéance de l’homme et de l’humanisme" et que "le « non » à Dieu a produit de la
cruauté et une violence sans mesure, qui a été possible seulement parce que l’homme ne reconnaissait plus aucune norme et aucun juge au-dessus de lui, mais il se prenait lui-même seulement comme
norme. Les horreurs des camps de concentration montrent en toute clarté les conséquences de l’absence de Dieu."
Pour lire tout le discours du St Père, cliquez sur ce lien: ASSISE 2011